En cette occasion encore, à travers mes salutations, je voudrais vous transmettre quelque chose que j’ai vécu récemment. D’où le titre de cette salutation : Entre admiration et douleur. Je voudrais vous parler de la joie qui a rempli mon cœur à Goma, en République Démocratique du Congo, blessée par une guerre interminable, et de la joie et du témoignage que j’ai reçus hier.
Il y a trois semaines, j’ai eu l’occasion de visiter en Ouganda le camp de réfugiés de Palabek qui, grâce à l’aide et au travail des Salésiens de ces dernières années, n’est plus un camp de réfugiés soudanais mais un lieu où des dizaines de milliers de personnes se sont installées et ont trouvé une nouvelle vie.
J’ai traversé ensuite le Rwanda et suis arrivé à la frontière dans la région de Goma, une terre merveilleuse, d’une nature belle et riche (et pour cette raison si désirée et désirable). Eh bien ! à cause des conflits armés, il y a plus d’un million de personnes déplacées dans cette région qui ont dû quitter leurs maisons et leurs terres. Nous avons également dû quitter la présence salésienne à Sha-Sha, qui a été occupée militairement.
Ce million de personnes déplacées sont arrivées dans la ville de Goma. À Gangi, l’un de ces quartiers, se trouve l’œuvre salésienne « Don Bosco ». J’ai été immensément heureux de voir le bien qui s’y fait. Des centaines de garçons et de filles ont une maison. Des dizaines d’adolescents ont été arrachés à la rue et vivent dans la maison de Don Bosco. Là, à cause de la guerre, 82 nourrissons et petits enfants qui ont perdu leurs parents ou ont été « abandonnés » parce que leurs parents ne pouvaient pas s’occuper d’eux ont trouvé un foyer.
Et là, dans ce nouveau Valdocco – l’un des nombreux Valdocco dans le monde – une communauté de trois sœurs de San Salvador, avec un groupe de dames, toutes soutenues par la maison salésienne avec l’aide généreuse de bienfaiteurs et de la Providence, prennent soin de ces enfants. Quand je suis allé leur rendre visite, les religieuses avaient habillé tout le monde en habits de fête, même les bébés qui dormaient dans leurs berceaux. Comment ne pas ressentir une grande joie dans nos cœurs pour tant de bien qui se fait, malgré la douleur causée par l’abandon et la guerre !
Mais mon cœur a été vraiment touché lorsque j’ai rencontré quelques centaines de personnes venues me saluer à l’occasion de ma visite. Elles font partie des 32 000 personnes déplacées qui ont fui leurs maisons et leurs terres à cause des bombes et sont venues chercher refuge ici. Elles l’ont trouvé dans les cours de récréation et sur les terrains de la maison de Don Bosco à Gangi. Ces personnes n’ont rien, elles vivent dans des cabanes de quelques mètres carrés. C’est leur réalité. Ensemble, nous cherchons un moyen pour trouver de la nourriture chaque jour. Mais savez-vous ce qui m’a le plus impressionné ? Ce qui m’a le plus frappé, c’est que lorsque j’étais avec ces centaines de personnes, principalement des personnes âgées et des mamans avec enfants, elles n’avaient pas perdu leur dignité ni leur joie ni leur sourire. J’ai été émerveillé et avais le cœur attristé en même temps par tant de souffrances et de pauvreté, même si nous faisons notre part au nom du Seigneur.
Un concert hors du commun
J’ai ressenti une autre grande joie lorsque j’ai reçu un témoignage de vie qui m’a fait penser aux adolescents et aux jeunes de nos présences, et aux nombreux enfants de parents qui me lisent peut-être et qui sentent que leurs enfants sont démotivés, s’ennuient dans la vie ou n’ont aucune passion pour presque rien.
Parmi les invités de notre maison, ces jours-ci, se trouvait une pianiste extraordinaire qui a parcouru le monde en donnant des concerts et qui a fait partie de grands orchestres philharmoniques. C’est une ancienne élève des Salésiens et dont la grande référence et modèle a été un Salésien, aujourd’hui décédé. Elle a voulu nous offrir ce concert dans l’atrium du temple du Sacré-Cœur à Rome, en hommage à Marie Auxiliatrice qu’elle aime tant, et en action de grâce pour tout ce qu’a été sa vie jusqu’à présent.
Et je dis cela parce que notre chère amie, à 81 ans, nous a gratifiés d’un concert merveilleux, d’une qualité exceptionnelle. Elle était accompagnée de sa fille. Et à cet âge, alors que certains de nos familiers aînés disent depuis longtemps qu’ils ne veulent ou ne peuvent plus rien faire quoi que ce soit qui demande des efforts, notre chère amie, qui pratique le piano tous les jours, a fait vibrer ses doigts avec une merveilleuse agilité, s’immergeant – et nous avec – dans la beauté de la musique. De la bonne musique, avec un sourire généreux à la fin de sa performance et l’offrande d’orchidées à Marie Auxiliatrice étaient tout ce dont nous avions besoin en cette merveilleuse matinée.
Et mon cœur salésien ne pouvait s’empêcher de penser à ces garçons, à ces filles et à tous ces jeunes qui n’ont peut-être pas ou n’ont plus rien qui les motive dans leur vie. Elle, notre concertiste, à 81 ans, vit dans une grande sérénité et, comme elle me l’a dit, continue d’offrir le don que Dieu lui a fait, et chaque jour elle trouve de plus en plus de raisons de le faire. Voilà bien une leçon de vie et un témoignage qui ne laissent pas le cœur indifférent.
Merci, mes chers amis, merci du fond du cœur pour tout le bien que nous faisons ensemble. Aussi petit soit-il, il contribue à rendre notre monde un peu plus humain et plus beau.
Que le Bon Dieu vous bénisse ! »